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Nous vous en disons plus sur l’histoire du vase de Soissons
L’histoire du vase de Soissons peut n’être pour certains qu’une vague réminiscence des années d’école lorsqu’il était question du tout début du Moyen-Âge. Un récit dont on ne sait plus trop s’il s’agit d’une vérité qui a traversé les siècles pour arriver jusqu’à nous ou bien d’une légende… En réalité cet épisode a bel et bien eu lieu et l’histoire en a été écrite par Grégoire de Tours, un évêque historien, qui s’est attelé au VIème siècle à une vaste histoire des Francs. Le récit des aventures de ce vase liturgique a été ainsi couché sur le papier près d’un siècle après les faits.
Pour comprendre, il faut donc remonter le temps jusqu’à ces années qui ont fait la jonction entre l’Antiquité et le Moyen-Âge.
Romains vs Germains
Petit rappel : depuis 51 av. J-C et la défaite de Vercingétorix à Alésia, c’est toute la Gaule qui est occupée par les romains. La civilisation gallo-romaine peut désormais s’épanouir sur tout le territoire et l’empire romain est à son apogée. Mais depuis le milieu du IIème siècle, les gallo-romains voient s’installer sur le territoire des tribus venues de l’Est, les germains, qui vont petit à petit déstabiliser le pouvoir. Puis, à partir du Vème siècle, la pression sur la frontière du Rhin s’intensifie et la géographie de l’actuelle France se recompose totalement en fonction de l’installation des Wisigoths, des Burgondes, des Francs… L’empire Romain vit ses dernières heures et sa chute en 476 marque la fin de l’Antiquité et le début du Moyen-Âge.
Quelques années auparavant, vers 430, l’une des tribus, les Francs Saliens s’établissaient au nord de la Gaule sous le commandement de leur chef, Mérovée. En 481, c’est son petit-fils, Clovis, qui monte sur le trône et prend la direction des opérations. Il a alors une quinzaine d’années et il reçoit en héritage un territoire resserré situé entre la mer du Nord et l’Escaut. C’est sans compter l’ambition du jeune homme qui a bien l’intention d’étendre son domaine. Il va même jusqu’à défier Syagrius, le dernier représentant de l’autorité romaine, pour imposer son pouvoir sur tout le nord de la Loire. En 486, a lieu la célèbre bataille de Soissons remportée par Clovis.
C’est ici que nous retrouvons le fil de notre histoire puisque le roi des Francs choisit d’y établir sa capitale !
Clovis et le vase de Soissons : entre pillages et pardon
A chaque parcelle de territoire conquis, les armées de Clovis pillent les habitations et les églises pour ensuite se partager les trésors récoltés selon une méthode bien rodée : le tirage au sort ! Ce jour-là dans le butin se trouve un vase liturgique de grande valeur qui a peut-être été dérobé à Reims. Très attaché à ce précieux objet, l’évêque demande à Clovis de le lui rendre. En contrepartie, il pourra garder tout le reste…. Pour des raisons que nous comprendrons plus tard, le jeune roi promet à l’évêque de lui rendre le vase.
Mais qui a cassé le vase de Soissons ?
Au jour prévu du partage du butin, lorsque tous les soldats sont réunis sur la place principale de Soissons, Clovis leur demande que lui soit attribué le vase, en plus de sa part. Tous donnent leur accord, sauf un qui s’écrie « Tu ne recevras ce que le sort t’attribuera vraiment » et, rageusement, frappe le vase de sa hache. Stoïque, Clovis laisse faire et encaisse l’affront en silence. C’est donc largement endommagé que l’évêque récupère l’objet.
Seulement voilà, il est important pour Clovis de ne pas froisser l’Église en se faisant notamment pardonner les pillages commis. En effet, en vue de nouer une alliance, Clovis le païen compte s’unir à une princesse burgonde de religion catholique. Pour pouvoir se marier, il a promis de se convertir. Impossible si les relations avec l’évêque sont mises à mal ! Dans ces conditions, l’affaire du vase de Soissons doit être vengée.
La vengeance
Quelque temps plus tard, alors que Clovis passe en revue ses troupes, il reconnaît l’insolent soldat qui a osé défier son autorité. Il se place alors devant lui, lui reproche sa mauvaise tenue et lui arrache sa francisque des mains. Alors que le soldat se baisse pour la ramasser, Clovis lève sa hache et l’abat sur le crâne de l’homme qui s’effondre. Le roi des Francs aurait alors lancé « Ainsi as-tu fait au vase à Soissons ». Clovis vient de régler ses comptes en même temps qu’il donne un gage de bonne foi aux autorités religieuses. Mais ce n’est pas tout car, si elle a traversé les siècles, c’est que cette histoire porte en elle d’autres enseignements.
La morale de l’histoire
Si nous ne sommes pas dans une fable de La Fontaine, il y a tout de même une morale, disons plutôt une leçon à en tirer…
Par ce geste, et avant même sa conversion, Clovis porte haut le rapprochement avec l’Église catholique et prévient ses troupes qu’après des années de pillage, il s’agit maintenant que justice lui soit rendue. Et plus généralement, c’est un message fort qui est donné : qui défie l’autorité du chef en subira un jour les conséquences. A bon entendeur !